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L'entrée des évêques à Orléans avant la Révolution




La surveille du jour de l'entrée étant venue, le nouvel évêque se rend en l'abbaye de la Cour-Dieu, située dans la forêt d'Orléans [à Ingrannes NDLR]... Il est conduit dans la maison abbatiale aux lieux préparés pour son souper et son coucher.



Le lendemain matin, le prélat part de cette abbaye pour se rendre l'après-midi en celle des religieuses de Saint-Loup..., et arrive enfin à Orléans le soir du même jour. En entrant dans la ville, l'évêque va descendre avec toute sa suite en l'abbaye de Saint-Euverte pour y souper et loger la nuit suivante...


Il sort sur les six heures du matin de la maison abbatiale de Saint-Euverte. Là viennent le rejoindre les communautés religieuses, les ecclésiastiques de la ville. Le recteur et les docteurs-régents de l'Université d'Orléans, revêtus de leurs robes d'écarlate, assistés des docteurs-agrégés, et de leurs officiers, bedeaux et portemasses, se présentent pour lui rendre leurs respects ; en même temps le recteur, au nom de ladite Université, fait une harangue latine au dit seigneur évêque sur son heureux avènement en sa ville, lequel répond en la même langue. Aussitôt après paraissent les maires, échevins, capitaines et autres officiers de la maison de ville d'Orléans avec leurs cinquanteniers. Ils saluent d'abord leur évêque, passant tous devant lui les uns après les autres ; puis un avocat, officier de la ville, lui fait aussi une harangue latine, et le capitaine de la compagnie colonelle une en français, et le prélat répond à chacun d'eux en la même langue qu'ils lui ont parlé...


Le cortège se rend à Saint-Aignan, où l'évêque est Installé connue chanoine honoraire de la Collégiale. La procession se remet en marche et se dirige vers la cathédrale. Les corps constitués sont en tête ; puis les chanoines de Sainte-Croix, qui sont venus au devant de l'évêque. Après eux suivent les chanoines et chapitre de Saint Aignan, chantant le psaume Memento Domine, pendant que le nouvel évêque est porté de la nef jusque hors du cloître, où étant arrivé, le prélat donne, aux chanoines de Saint Aignan et à tout le peuple qui sont sous la porte de leur cloitre, la bénédiction solennelle ; après quoi lesdits chanoines le saluent et retournent à leur église. Cela étant fait, il se lève pour se rasseoir dans un fauteuil de velours violet préparé pour cela, et qui est tourné du côté de la rue Bourgogne.


Alors le seigneur évêque ordonne à son bailli de faire appeler les quatre barons qui sont obligés de le porter le jour de son entrée solennelle, et qui ont été avertis et sommés de s'y rendre en personne, ou par procureurs, qui doivent être gentilshommes ; à savoir : le baron d'Yèvre-le-Chastel, le baron duc de Sully, le baron du Cherai, et le baron d'Aschères et Rougemont. A cet appel, les seigneurs comparaissent ou leurs procureurs. Comme il y a dispute entre les seigneurs pour la préséance, chacun d'eux ne manque pas en cette occasion de faire représenter par le bailli de la justice, dont il s'est fait assister, le droit qu'il prétend avoir de prendre la première place, et de protester contre tout ce qui pourrait être fait au contraire. Sur quoi le seigneur évêque, après qu'on leur a donné à tous acte de leurs protestations respectives, fait ordonner par son bailli que les parties se pourvoiront en la cour de parlement, pour s'y faire régler, et qu'en attendant, sans préjudicier aux droits des parties, les seigneurs barons ou leurs procureurs prendront leur rang et place dans l'ordre où ils ont été appelés. A quoi ayant acquiescé, le seigneur évêque est élevé sur les épaules des gens préposés par les barons, pendant qu'eux ou leurs procureurs représentants tiennent, chacun une main posée sur les extrémités des bâtons attachés au fauteuil, et qui servent à le porter.


La marche continue alors et la procession, tournant à main gauche au coin de Saint-Victor, s'avance jusqu'à l'endroit où était autrefois l'ancienne porte de Bourgogne. C'est là où tous les juges royaux de la ville d'Orléans attendent le nouvel évêque, pour le complimenter sur sa joyeuse entrée, et lui présenter les criminels qu'ils ont eu soin de faire sortir des prisons, et conduire par leurs huissiers jusque dans une maison voisine.


Le nouvel évêque étant arrivé en cet endroit, son fauteuil est mis en bas et placé contre le mur d'une des tours restantes de l'ancienne porte, qu'on a eu soin de préparer et d'orner à cet effet. Aussitôt l'official dudit seigneur évêque complimente ce prélat ; il est suivi du lieutenant-général au bailliage et siège présidial d'Orléans, et du lieutenant criminel dudit siège, qui le haranguent à la tête de leur compagnie. Le prévôt d'Orléans se présente ensuite avec les officiers de son corps, et fait son compliment, comme font aussi le grand maitre, ou en son absence un des maitres particuliers des eaux et forêts de l'apanage, et le prévôt des maréchaux, accompagnés, l'un des officiers de son siège, et l'autre des lieutenants et autres officiers de la maréchaussée. Chacun d'eux, avec le bailli de l'évêché, ayant représenté à ce prélat, que suivant l'usage immémorial des juges leurs prédécesseurs, ils ont amené tous les prisonniers détenus dans les prisons, afin qu'en vertu du privilège accordé par nos rois aux évêques d'Orléans, il donne auxdits criminels le pardon, la rémission et abolition de leurs crimes. Le nouvel évêque prend le serment desdits juges du procureur du roi au bailliage, et de celui de la prévôté. Ils jurent tous ayant les mains sur les saints Évangiles, qu'ils n'ont détenu ni détourné aucun prisonnier criminel de leur ressort et juridiction ; comme aussi qu'ils n'ont avancé ni procès, ni jugement, ni exécution d'iceux, pour les empêcher d'obtenir leur grâce ; enfin qu'ils n'ont rien fait qui puisse nuire en aucune manière au privilège dudit seigneur évêque.


Le serment pris, et après que les geôliers des prisons royales et de l'officialité ont aussi fait serment comme ils ont amené tous les prisonniers qu'ils avaient en leur garde, on fait sortir tous les criminels de la maison où ils étaient, lesquels se jettent à genoux devant le seigneur évêque, lui demandent grâce, en criant par trois fois. miséricorde ! Aussitôt, ce prélat les met entre les mains du bailli et du procureur fiscal de la justice qui les font avancer à la tête de la procession où ils marchent deux à deux, tête nue et sans épée, et précédés des geôliers des deux prisons.


Après ces cérémonies, la procession continuant sa marche par la rue Bourgogne, passe devant Saint-Liphard, Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, la Commanderie de Saint-Marc; tourne au coin de la rue de la Véronique, appelée autrement du Battoir-Vert entre dans celle de Saint-Martin de la Mine, d'où elle entre enfin dans le cloître de Sainte Croix, où chacun pénètre dans la Cathédrale, à l'exception des doyens, chanoines et chapitre d'icelle, qui demeurent à la porte qu'ils font fermer et là y attendent leur nouvel évêque.

Ce prélat étant arrivé devant la grande porte de l'église, le fauteuil dans lequel il est porté est mis en bas. Le prélat se lève. Le doyen lui présente alors la croix et le livre des saints Évangiles à baiser, le complimente ensuite sur son heureux avènement, en langue latine. Le nouvel évêque y répond en la même langue ; après quoi le doyen ouvre le livre où sont contenus les serments qu'ont accoutumé de faire les évêques à leur nouvelle entrée, et le requiert humblement d'y vouloir bien satisfaire. Ce que le seigneur évêque fait, la main sur les saints Évangiles.


Après ce serment, la porte de l'église est ouverte, et tout le chapitre y entrant, le doyen sur le fauteuil, dit au nouvel évêque, et en latin : Révérend père, le Seigneur dit dans l'Évangile, que celui qui n'entre pas par la porte dans la bergerie, est un voleur et un larron, et que c'est lui-même qui est la voie, la vérité et la vie : Voyez. si vous voulez entrer par cette voie? » A quoi le nouvel évêque ayant répondu : « Je le veux », le doyen ajoute : « Votre entrée est-elle pacifique? » Le nouvel évêque lui dit : "Mon entrée est pacifique." Sur quoi le doyen dit : « Nous en rendons grâces à Dieu ; que le nom du Seigneur soit béni, depuis maintenant jusqu'en l'éternité ». Le doyen alors comme grand archidiacre, à qui il appartient d'installer le nouvel évêque, se met à côté de ce prélat et lui dit en latin (car c'est toujours en cette langue qu'il lui parte): « Entrez, Révérend père, dans l'église sainte du Seigneur». puis en lui présentant un ruban de soie attaché à une des cloches de l'Eglise, que l'évêque fait sonner par trois fois, il lui dit: "Recevez par notre ministère, au nom du Seigneur, le gouvernement et la conduite de cette église, qui est la vôtre ; et soyez l'instrument et la trompette du salut de vos peuples par la prédication de la parole de Dieu." Alors le grand chantre entonne Laus honor, et tout le chœur continue, virtus, gloria Deo patri et filio, sancto simul paraclito in saecula saeculorum Amen. Le seigneur évêque passe dans la nef, où il est salué par les communautés religieuses, qui y sont rangées des deux côtés. et entre dans le chœur, jusqu'au pied de l'autel, où ayant fait la prière, il y monte et le baise, Ie doyen qui l'y accompagne lui disant : "Montez, Révérend père, à l'autel du saint des saints, priez pour l'Église, pour le troupeau que Dieu vous a confié".


De là, le nouvel évêque est conduit au trône épiscopal, où il est installé par le doyen qui lui dit : «Voilà la chaire de votre dignité; mais souvenez-vous que le Seigneur, qui vous ayant fait naitre de vos pères, vous a aussi choisi pour vous faire asseoir entre les princes, et vous donner un trône de gloire. » Ensuite le prélat est conduit à la première stalle ou chaire, où se met ordinairement le sous doyen de l'Église, et le doyen lui dit. en l'y faisant asseoir: «Ce siège est le symbole de votre amour et de votre tendresse pour vos enfants ; lorsque vous vous y placerez, vous devez porter dans votre cœur les gages de cet amour: portez-les donc toujours, et les conservez au nom du Seigneur.»


Après ces installations, le grand chantre entonne l'hymne Te Deum laudamus. Après quoi le nouvel évêque descend de sa place, et est conduit dans la marelle ou sacristie, pour être revêtu d'une chasuble, au lieu de la chape qu'il avait, afin de célébrer la Messe solennelle du Saint-Esprit, qui est chantée avec tout l'appareil et les cérémonies qui s'observent dans l'Église d'Orléans, les jours des plus grandes tètes.


La Messe étant finie, le seigneur évêque après son action de grâces, est conduit à son hôtel, accompagné des dignités et chanoines de son église, précédés du sacristain portant la croix élevée, de deux enfants de chœur avec les chandeliers et le bénitier.


Étant arrivé dans son vestibule, le syndic du chapitre lui dit en langue latine: « Révérend père en Dieu, je vous avertis que vous devez aujourd'hui, suivant la coutume, donner à dîner à votre table à tous les sieurs chanoines de votre Église d'Orléans ». A quoi le nouvel évêque répond : "Je les y ai fait inviter, et je les y invite encore". Ensuite, il donne à dîner dans son hôtel et à sa table, aux doyen, dignités et chanoines de la Cathédrale ; aux doyen, dignités et chanoines de l'église Saint-Aignan, et au doyen et dignités seulement des deux collégiales de Saint-Pierre-Empont et de Saint-Pierre-le-Puellier, qui tous s'y trouvent en bonnets et robes de cérémonie.


A l'issue du dîner, chacun se rend à l'hôtel épiscopal, où le théologal de l'Église d'Orléans, en bonnet et robe de cérémonie, monte dans une chaire qu'on a préparée au milieu de la cour, et fait une exhortation aux rémissionnaires qui y sont tous placés sur des échafauds qu'on a eu soin de faire dresser.


Cette exhortation finit par un avertissement qu'il leur donne de demander humblement au Seigneur Évêque grâce et pardon de leurs crimes. Aussitôt tous les rémissionnaires se jettent à genoux, et crient par trois fois : MISERICORDE. Le nouvel évêque, assis dans un fauteuil devant l'une des fenêtres qui regardent sur cette cour, après une vive remontrance qu'il fait aux criminels, et un ordre de récompenser par des pénitences volontaires les supplices que leurs crimes leur ont mérités, il leur donne le pardon, rémission et abolition de leurs crimes, de la même manière que les évêques ses prédécesseurs ont fait par le passé, suivant le pouvoir à eux donné par les rois de France, et dont, ils ont joui à leur entrée.


Ensuite un des aumôniers du nouvel évêque avertit les criminels de se mettre à genoux, pour recevoir la bénédiction que ce prélat leur donne solennellement. Après quoi on leur distribue suivant la coutume, pour leur dîner, les viandes qui ont été desservies de la table du seigneur évêque ; et chacun se retire.


Tel fut avant la Révolution, le cérémonial des entrées de nos évêques. Ce fut Mgr de Jarente d'Orgeval qui le suivit le dernier. La Révolution ayant aboli les abbayes de la Cour-Dieu et de Saint-Euverte, et la collégiale de Saint-Aignan, Mgr Bernier, le premier évêque d'Orléans préconisé en vertu du concordat, dut adopter un autre itinéraire pour faire son entrée dans sa ville épiscopale. Cette cérémonie eut lieu le dimanche 4 juillet 1802, jour où il prit lui-même possession de son siège, en présence de M. Blain, délégué de Mgr du Belloy, archevêque de Paris. Ses successeurs ont copié leur entrée sur la sienne.

Dans les Annales Religieuses et Littéraires de la Ville d'Orléans en 1894

extrait de la Description de l'entrée des Évêques d'Orléans, 1734

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