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Les monuments érigés à Orléans en l'honneur de Jeanne d'Arc avant 1792


Nous ne sommes plus guère occupés, depuis trois-quarts de siècle, qu'à réparer les ruines amoncelée, chez nous par le vandalisme révolutionnaire. Aussi les Orléanais, en répondant à l'appel de leur Évêque, qui de sa voix autorisée les invite à élever un monument expiatoire à la mémoire de la Pucelle d' Orléans, ne feront que suivre les tradi­tions et reprendre les intentions de leurs ancêtres.


Dès que les habitants d'Orléans, qui avaient toujours eu foi en l'ins­piration et l'innocence de leur libératrice, connurent le résultat de la la révision de son procès, ils s' empressèrent de lui ériger, sur le pont même, témoin de ses exploits, un monument commémoratif. La ville y contribua de ses deniers, et les dames et demoiselles de leurs parures et de leurs joyaux (opera sumptuque virginum ac matronarum Aurelianensium).


Dans ce monument inauguré en 1458, la sainte Vierge se tenait debout au pied d'une croix de bronze, aux bras fleurdelisés. A ses côtés étaient agenouillés et les mains jointes, dans l'attitude de la prière, Charles VII à gauche et Jeanne d'Arc à droite. Le roi, la tête nue, avait sa lance devant lui, et la Pucelle, les cheveux flottants, avait près d'elle, un étendard de combat.


Ce fut Louis d'Orléans qui composa cette inscription gravée sur le socle du monument :

AD INCREDUBILIS REI INCREDUBILEM MEMORIAM, AD DEI GLORIAM INCOMPARABILEM, AD VIRGINJS MATRIS COMMENDATIONEM, AD CAROLI VII DECUS, AD LAUDEM JANIAE ARXIAE ET TANTI OPERIS, AETERNUM MONU­MENTUM, SENATUS POPULUSQUE AURELIANENSIS, MATRONAE ET VIRGINES AURELIANENSES, VIRGINI FORTUSSIMIE, VIRAGINI CORDATISSIMAE, HANC CRUCEM HASQUE STATUAS, AUTHORITATE REGIA PONI CURAVERUNT, ANNO SALUTIS 1458.

Nos pères en choisissant le bronze pour matière de leur monument, avaient sans doute voulu qu'il défiat les siècles (aeernum monumentum). Ils avaient compté sans le fanatisme de sectaires de plusieurs de leurs descendants. En effet, ce premier monument expiatoire du crime du 30 mai ne devait guère durer plus de 100 ans. En 1567, à la voix de l'iconoclaste Théodore de Bèze, les soldats huguenots, se ruèrent sur le monument, brisèrent les statues de la Pucelle et de la Sainte-Vierge et les jetèrent dans la Loire : les catho­liques parvinrent à sauver la statue de Charles VII.


Trois ans plus tard, le monument fut restauré, aux dépens de la ville, par un célèbre fondeur, Hector Lescot, dit Jacquinot, et re­placé sur le pont le 16 mars 1571.


Les statues de Charles VII et de Jeanne d'Arc occupèrent les mêmes places que dans le premier monument. Seulement on plaça à côté du roi un heaume couronné, au lieu d'une simple couronne et aux pieds de la Pucelle un simple heaume. Les cheveux n'étaient plus flottants, ils étaient liés par un ruban. La Vierge fut assise au bas de la croix et le Christ placé sur ses genoux ; au haut de la croix on ajouta un pélican se saignant pour ses petits.


Sur le socle du monument, en allant de droite à gauche. on voyait l'écu de France, les armes d'Orléans, avec cette devise, s’enlaçant avec une guirlande de lis : Francorum regni medium cor et aurea sedes ; et l'armoirie de la Pucelle.


En 1729, un violent ouragan abattit la croix de bronze ; elle fut promptement remplacée par une croix de bois. En 1745, les travaux qu'on fut forcé de faire à l' ancien pont obligèrent à enlever le monu­ment entier. Il fut relégué dans les magasins de l'Hôtel-de-Ville. Mais après 25 ans d'oubli, à la sollicitation de l'artiste orléanais Desfriches, les échevins, au grand contentement des Orléanais et des étrangers, le replacèrent, en 1771, dans la petite place, que forme la jonction de la rue Royale avec celle de la Vieille-Poterie. D'après un plan dressé et dessiné par Desfriches, on y fit quelques changements. Au pied de la croix, on plaça un serpent roulé sur lui-même et mordant une pomme ; derrière, on fixa le nid du pélican, qui était jadis au haut. Le piédestal en pierre, entouré d'une grille de fer, était fort beau : deux tables de marbre noir y étaient encastrées, avec deux inscrip­tions gravées en lettres d'or, et composées par M. J. Ducoudray, alors maire d'Orléans.


Sur la première, qui regardait la rue Royale, on lisait ce qui suit :

DU RÈGNE DE LOUIS XV,

Ce monument érigé sur l'ancien pont

Par le Roi CHARLES VII, l'an 1458,

En action de grâces de la délivrance

De cette ville et des victoires remportées

Sur les Anglais par JEANNE D'ARC,

Dite LA PUCELLE D'ORLÉANS,

A été rétabli dans sa première forme,

Du vœu des habitants, et par les soins de

M. JACQUES DU COUDRAY, Maire

MM Isambert de Bagnaux, Wandebergues de Villebouré, Boilève de Comcy, Deloyne de Gautray : Echevins

MM Desfriches ,Chaubert, Colas de Malmusse, Arnault de Nobleville, Boillève, Lhuillier de Blanchevilliers : Conseillers

L'an M. DCC. LXXI

L'inscription de la face opposée était remarquable par sa noble simplicité.

D. O. M

Pietatis in Deum.

Reverentiae in Dei-Param,

Fidelitatis in Regem,

Amoris in Patriam

Grati animi in Puellam,

Monumentum

Instauravere cives Areliani,

Anno Domini M. D. CC. LXXI.

Ce second monument expiatoire, replacé au sein de la cité, ne devait pas durer plus longtemps que le premier.

Les révolutionnaires n' eurent pas plus de patriotisme que les hugue­nots : ils en eurent moins ; car on peut croire que les premiers des­tructeurs du monument de la Pucelle étaient des étrangers ; nous sommes obligés d'avouer que les seconds étaient orléanais


Le 29 août 1792, sous prétexte de procurer à la garde nationale des canons, les membres de la section de Saint Victor proposaient aux "administrateurs du département de faire démolir le monument de Charles VII, monument qui insulte à la liberté du peuple français et qui n'est propre qu'à irriter des hommes qui ont trop longtemps gémi sous la servitude des rois ; car les canons, qu'on en tirera, sont maintenant les seuls monuments qui doivent exister chez une nation libre pour faire trembler les tyrans."


Le conseil général ne répon­dit à cette pétition qu'en passant à l'ordre du jour. Mais six jours après, l'assemblée départementale « considérant que le monument élevé sur la rue Royale, ne représentant pas les services de l"héroïne, dont il était destiné à perpétuer le souvenir, arrêtait que le monument de Charles VII ainsi que les inscriptions existant sur les faces de son pié­destal, seraient enlevés sur le champ et déposés dans un lieu sûr pour être examinés par un artiste nommé par la municipalité sur le rapport duquel il serait statué pour la conversion et l'emploi du métal qu'il appartiendrait."


Le même jour, la municipalité, saisie de cet arrêté, en décrétait l'exécution. Ce fut un Voltairien, un ami de Danton et de Marat, l’infâme et sanguinaire Léonard-Bourdon, qui, en présence des Marseillais, porta le premier coup de marteau à l'antique monument de Jeanne d'Arc, en récitant sans doute les passages les plus ordurier du poème de la Pucelle. On en tira 1700 livres de bronze. Le conseil Général de la commune arrêtait, le 21 septembre, que ce bronze serait employé à la fabrication des canons, et que, pour conserver la mémoire du monument de la Pucelle, un des canons porterait le nom de Jeanne d'Arc, surnommée la Pucelle d'Orléans.


Il nous reste à réparer la double œuvre de destruction, accomplie en 1567 et en 1792. Nous le devons à la mémoire de notre seconde Libératrice ; nous le devons aussi à la mémoire de nos pères, qui en 1458, en 1571 et en 1771, ne comptèrent pas pour affirmer envers elle leur éternelle reconnaissance. Celte dette, ils nous l'ont léguée : noue ne la renierons pas.


L'abbé Théophile Cochard



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