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Pèlerinage de Sainte Corneille (Jouy-le-Potier, Le Lude)


Ce mot de Lude dérivé sans doute du mot latin Ludus (jeu) semblerait indiquer un endroit réservé au plaisir. Sa position au milieu des bois et au bord de l'eau y étant tout à fait propice. La fertilité du sol et la belle végétation que l'on ne retrouve pas dans les autres parties de la commune, dues à la rivière du Cosson, n'ont pas été sans y attirer des habitants dès les temps les plus reculés.


Si le Lude a pu être un rendez-vous quelconque de jeux, plaisirs, chasses etc., il a été et encore depuis un temps immémorial un but de pèlerinage. De quinze et vingt lieues à la ronde et même plus, on y vient implorer pour les enfants en langueur, une sainte dont le nom ne figure pas parmi les saintes invoquées par l'église et qui n'a pas de date qui lui soit consacrée. Sainte Corneille a un jour par mois où elle est le plus en vénération : c'est le premier dimanche de la lune. Ce jour dédié à Vénus et premier de la période lunaire, semble avoir une origine païenne. La fontaine qui sort de terre au sud du château et qui porte le nom de Sainte Corneille avait sans doute sa divinité Cornelia, comme celle de Fleury-aux-Choux (Fleury-les-Aubrais ndlr) près d'Orléans avait sa déesse Acionna.


Cornelia est devenue sainte Corneille à la suite du voyage de l’évêque d’Orleans saint Euverte à Rome au VIème siècle pour demander au pape l’autorisation de christianiser les traditions païennes locales. On suppose que la fontaine date de 425. ndlr


Ici, pas de médailles, ni d'inscription, mais une statuette. Le nom de Cornelia a été francisé en Corneille et christianisé en Sainte Corneille, ou Cornélie. Malheureusement, la fontaine a été abandonnée depuis longtemps. Un propriétaire, pour éloigner les nombreux pèlerins qui en rendaient l'eau peu potable, en avait transporté la statuette, et l'avait placée dans l'escalier d'une tour du 16e siècle située dans la cour du château. Les pèlerins n'ayant plus d'eau à emporter enlevaient quelques fragments de la statuette pour en faire des amulettes qu'ils suspendaient au col des enfants.


Généralement, les pèlerins, avant d'aller au Lude, viennent à l'église de Jouy se faire réciter l'évangile de Jean. Ce qu'il y a de curieux, c'est la quantité d'objets, d'habillements d'enfants que l'on voit déposés dans l'oratoire : des brassières, corsages, bonnets, bas, etc. voire même des images profanes telles que les marchands actuels donnent en prime, et fixées sur les murs avec des épingles ; tout cela est abandonné dans l'espoir de guérison.


L'oratoire qui est très étroit, a été à un moment tellement rempli d'effets, que le propriétaire s'est vu obligé d'en incinérer une partie, afin de rendre l'accès du lieu plus facile.


Deux faits se seraient passés dans cet endroit depuis sa construction : un enfant y étant entré avec des béquilles en serait sorti guéri.

Un mauvais drôle en aurait profané l'endroit en y séjournant une nuit avec une créature, en serait sorti aveugle. Il est à la connaissance de l'auteur (E. de Basonnière ndlr), que le susdit personnage, mort il y a quelque quarante ans était privé de la vue

In Jouy-le-Potier - E. de Basonnière - ed. Gout Orléans, 1914 (2e ed.)

 

Le pèlerinage aujourd'hui

on trouve sur le site internet de la ville de Jouy-le-Potier :

Sainte Corneille, patronne de la Sologne et dont une statue est située dans la façade nord de l'église de Jouy-le-Potier, a sa dévotion située au Lude depuis plus de 1500 ans. Un pèlerinage a lieu chaque année fin juin, qui regroupe plusieurs centaines de personnes venant de toute la Région. La dévotion qui concerne surtout les enfants en langueur, remonte au IV° siècle, période où la divinité païenne et druidique Cornelia a été christianisée par Saint-Euverte, ce dernier ayant reçu du Pape une statuette d'une jeune martyre africaine pour remplacer le culte païen.

 

Quelques réflexions à propos du culte de sainte Corneille en Orléanais par Jacques CHARLES


On sait peu de choses sur l'existence de cette sainte. Les Bollandistes placent au 31 mars le souvenir d'une vierge martyre, originaire d'Afrique, prénommée « Corneille » ou « Cornélie », nom que retiennent les Bénédictins de Paris dans leurs « Vie des saints et des bienheureux ».


L'abbé Bléau, dans « Sainte Corneille et La Chaussée », mentionne le dépôt de ses reliques dans la chapelle du château de Blois au temps des croisades. En 1379, elles sont transportées dans l'église paroissiale du Val à La Chaussée-St-Victor, et y retournent en 1582 après avoir été cachées pendant 20 ans. Une châsse neuve leur est attribuée en 1675, et elles sont soumises à un sévère examen par Mgr de Caumartin, évêque de Blois de 1720 à 1733.


Un pèlerinage important existe encore aujourd'hui à La Chaussée-St-Victor, surtout le dimanche qui suit le 5 juillet.


Qu'en est-il en Orléanais ? A Jouy-en-Pithiverais, on invoquait sainte Corneille au XIXe siècle pour la coqueluche : il existe une statuette de la sainte, sous les traits d'une jeune fille.


En Beauce, elle était invoquée pour la guérison du « mal bleu » ou angine couenneuse, qui faisait pousser aux malades des « cris de corneille ». La même dévotion se retrouve à la chapelle de Germonville (Teillay-le-Gaudin), réédifiée en 1882 : mais il semble qu'à cette époque on ait jugé opportun de remplacer le culte d'une hypothétique martyre africaine par celui du pontife romain saint Corneille, auquel le fait de figurer sur les diptyques du canon de la messe donnait un caractère d'authenticité absolue. De nombreux ex-votos figurent sur son bras droit, touchés par le malade avant d'être placés en contact avec l'image du saint guérisseur.


Enfin, on rencontre une « Fontaine Sainte-Corneille » à Jouy-le-Potier, près du château du Lude.


Une tradition locale rapporte qu'au cours du IX' siècle, un évêque d'Orléans érigea près de l'emplacement occupé actuellement par le château une statue de sainte Corneille, dans le but de supplanter un culte païen rendu en ce lieu à la divinité « Cornelia ». On s'y rend encore individuellement en pèlerinage aujourd'hui, mais uniquement à l'oratoire : autrefois on y venait pour obtenir la guérison des enfants atteints de maladie de langueur.


Mais alors que tout semble avoir été dit sur le culte de sainte Corneille, tout semble également devoir être remis en question. On invoque à Jouv-en-Pithiverais, commune de Teillay-le-Gaudin, sainte Corneille pour la guérison de la coqueluche alors que ce privilège est habituellement reconnu à saint Ursin dont, coïncidence étrange, les reliques à La Chaussée-Saint-Victor cohabitèrent avec celles de la sainte dans un même reliquaire jusqu'en 1678. Dans cette même localité, sainte Corneille est réputée guérir l'épilepsie. Mais ce pouvoir, dans des ouvrages sérieux, est unanimement reconnu au Pape saint Corneille. N'y a-t-il donc pas un culte de ce saint dans la région ?


Aucune église paroissiale ne lui a été dédiée dans l'ancien diocèse d'Orléans. Il fut cependant second patron de l'église abbatiale NotreDame de Cornilly, érigée dans la deuxième moitié du XIe siècle, à Contres (Loir-et-Cher), alors paroisse de l'archidiaconé de Sologne au diocèse d'Orléans, si l'on en croit une charte de 1087 où il figure conjointement avec saint Cyprien. Mais l'histoire de la fondation de cette abbaye reste bien imprécise, et d'après Eugène Jarry et M. Martin Demézil, la tradition qui lui attribue les reliques de sainte Corneille est douteuse. La légende de ce pontife se prête d'ailleurs à toutes les possibilités. On lui a même attribué l'origine des fameux alignements de Carnac, dont d'ailleurs l'église paroissiale est placée sous le vocable de saint Cornély. Sa statue représente le pape avec un bœuf couché à ses pieds (comme la statue de Germonville). Le Pape avait en effet interdit aux chrétiens de participer à des sacrifices païens et d'immoler des animaux, fusse à Dieu. Peut-être doit-on voir dans les restes du tumulus Saint-Michel, à Carnac, une manifestation du culte de Mithra, introduit à Rome vers le milieu du premier siècle avant J.-C., pratique contre laquelle s'était élevé Tertullien. Saint Corneille occupa le siège de Saint-Pierre une dizaine d'années après la disparition de Tertullien, de 250 à 253, et il eut à s'opposer au culte de Mithra. Il se peut que celui-ci ait été introduit dans la région de Carnac par les soldats et les colons romains. Une corne, symbole de fécondité, d'abondance et de renouveau, est aussi accordé à saint Corneille comme attribut, patron des animaux domestiques. Il n'est pas inconcevable de penser qu'à la suite du Christ, qui devait supplanter Mithra, les saints et saintes ont été après leur mort utilisés pour amplifier cette suprématie.


Bulletin de la Société archéologique et historique de l'Orléanais, janvier 1968

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